Les Taiwanais aiment-ils vraiment le chocolat ? La question n’est pas anodine dans la mesure où les phénomènes de mode et les rituels touchent beaucoup à l’alimentaire dans la société taiwanaise. A chaque occasion – fête traditionnelle, célébrations familiales ou professionnelles, rites religieux – est associé un aliment particulier. Si on mange des « gâteaux de la lune » au moment de la Mi-Automne, si on distribue un copieux plat de riz glutineux avec une cuisse de poulet et un œuf dur pour remercier les amis et collègues qui ont fait un cadeau de naissance, c’est du chocolat qu’on offrira à la personne aimée au moment de la Saint-Valentin. A Noël, non, le chocolat ne se vend pas aussi bien.
Or, il faut bien le dire, les Taiwanais ne connaissent guère du chocolat que les sous-produits que sont les barres chocolatées dont inondent le marché mondial les grands groupes agroalimentaires. A l’autre extrémité de la gamme, les grandes marques de chocolats belges ont été les premières à s’implanter et servent une clientèle plus à la recherche de cadeaux de prestige que d’expériences gustatives.
Le chocolat a longtemps eu mauvaise presse à Taiwan, la médecine chinoise lui attribuant un caractère trop « chaud » susceptible d’entraîner par exemple des saignements de nez. Depuis quelques années, on observe un renversement de tendance. C’est la carte santé qui est mise en avant pour promouvoir ce produit, et on attribue au cacao pur, de manière un peu rapide, des vertus diverses.
Kelly Tung [董家華], directrice pour Taiwan de Cacao et Chocolat – une enseigne appartenant au groupe français Maison du Chocolat qu’elle a découverte au cours de ses voyages d’affaires en France –, explique ne pas forcément chercher à jouer sur cet aspect mais préférer démythifier le produit en apprenant aux clients à mieux le goûter. Il faut d’abord leur faire comprendre que, contrairement aux chocolats belges, très crémeux et sucrés, le chocolat français est un produit léger, et surtout, qu’un bon chocolat n’a pas à être intensément cacaoté.
« Lorsque je demande aux clients ce qu’ils aiment, 80% d’entre eux répondent “du chocolat noir”. Si je leur demande de préciser à quel pourcentage de cacao, ils disent toujours “au-dessus de 75%”. C’est l’influence des médias taiwanais qui répandent l’idée que plus un chocolat est pur, meilleur il est à la santé. Pour ceux qui ne connaissent pas bien le chocolat, c’est donc d’abord un médicament. » Du coup, c’est une expérience faussée qu’ils ont du chocolat comme un produit très amer, âpre sur la langue – comme un médicament chinois… « En fait, non, le chocolat amer n’a pas à être âpre, et puis consommer des produits si cacaotés n’a pas de sens », dit Kelly Tung, qui, dans sa boutique climatisée, fait goûter du chocolat au lait salé à des clients surpris de la palette de goûts disponibles. « Il y a plus de 300 sortes de cacao dans le monde », rappelle Kelly Tung.
L’autre caractéristique majeure du marché du chocolat à Taiwan est la forte proportion d’hommes parmi la clientèle. « Je dirais que 80% de nos clients sont des hommes, assure Kelly Tung, qui gère aussi la marque De Neuville à Taiwan. Ils dépensent en moyenne de 800 à 1 000 dollars taiwanais par achat. Souvent, ce sont des habitués qui ont obtenu une carte VIP après avoir acheté pour 12 000 dollars de chocolat chez nous. Ils achètent pour offrir alors que les femmes viennent s’approvisionner en quantités plus petites, pour leur consommation personnelle. »
Quant aux produits qui marchent le mieux, les Taiwanais, il faut le savoir, n’aiment pas la petite pointe de cannelle ou de noix de cajou que les chocolatiers ajoutent parfois à leurs ganaches, car cela leur rappelle par trop certains médicaments chinois, mais ils adorent le praliné et les chocolats parfumés au caramel, aux agrumes ou au raisin. Le produit numéro un, c’est toutefois… le chocolat noir sans sucre.
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