30 janvier 2010

Pas de crise pour l’automobile de luxe à Taiwan !!

Le marché de la voiture de luxe à Taiwan détient un potentiel important qui contraste avec les difficultés dont souffrent les autres segments automobiles, ont déclaré hier, à l’occasion d’une conférence de presse conjointe, les concessionnaires taiwanais des plus grandes marques italiennes et Leopoldo Sposato, le directeur des Affaires commerciales à la représentation italienne.


« Je suis parfaitement optimiste et je pense que la récession sera résorbée à la fin de cette année », a déclaré Leopoldo Sposato, qui a souligné la robustesse de l’économie insulaire et le potentiel que renferme le marché du luxe dans l’île.

Alex Chao, le président de Lamborghini Taipei, partage cet optimisme, à tel point que sa marque a ouvert un nouveau magasin le mois dernier à Taipei.
« Il n’y a pas de crise dans notre secteur », a-t-il déclaré, notant que les ventes de véhicules d'une valeur supérieure à 10 millions de dollars taiwanais sont en hausse cette année. « Le marché est en pleine expansion et il faut s’attendre à voir les ventes doubler. En 2008, 10 Lamborghini se sont vendues à Taiwan. Les poches des acheteurs de voitures de luxe à Taiwan sont tellement profondes qu’on ne peut les sonder », a-t-il commenté. A titre de comparaison, il se vend chaque année entre 40 et 60 Lamborghini à Singapour et une centaine à Hongkong.

Fabrice de Murat, le Français qui représente Ferrari et Maserati à Taipei, n’est pas en reste lorsqu’il s’agit d’évoquer le potentiel du marché. « Voilà un phénomène digne d’intérêt :
alors que le marché automobile s’écroule littéralement, le segment de la voiture de luxe progresse », a-t-il expliqué, estimant que les changements affectant son secteur sont d’ordre plus psychologique que pécuniaire. « Nous considérons le marché taiwanais comme le second, juste après le Japon », a-t-il déclaré, notant que les ventes de Ferrari avaient progressé de 20 à 25 % en 2008 dans l’île par rapport à l’année précédente. Selon ce dernier, le marché a déjà progressé de 10% cette année, alors que les ventes sur les autres segments ont chuté de 30%.


Fabrice de Murat a enfin regretté le trop grand nombre de restrictions imposées au marché insulaire.


Source Taiwan Info.

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15 janvier 2010

Interview : un francais à Lukang !!

Un jeune francais passe 2 années à Taiwan dans le cadre d’un échange culturel. Taiwan Mag, par le biais de Delphine, l’a rencontré. Il nous livre ici une interview très personnelle, sur sa rencontre avec la vie et le peuple Taiwanais.





TaiwanMag : Bonjour YuGuo, peux tu te présenter ?
Luo YuGuo: Bonjour, j’ai 24 ans et je suis originaire d’un petit village agricole du sud ouest de la France. J’ai, comme beaucoup de français aujourd’hui, des origines internationales :françaises, espagnoles et italiennes.
Pour mon parcours récent, j’ai fait une terminale scientifique, à la suite de laquelle je suis parti à Taiwan en 2003-2004 en programme d’ échange-étudiants, un peu après l’épidémie de SRAS. J’ai ainsi passé un an en immersion totale (parfois rude !) dans des familles taiwanaises de la petite ville historique de Lukang, sur la côte Ouest de Taiwan, à 40 km de Taizhong. De retour en France en 2004, j’ai ressenti le besoin de me réorienter vers des études d’histoire pour mieux comprendre mes racines et la culture européenne, tout en poursuivant un peu l’apprentissage du chinois. L’année suivante je me suis véritablement inscrit en licence de chinois à l’université Michel de Montaigne à Bordeaux, dans le but de repartir à Taiwan. J’ai finalement obtenu une bourse du gouvernement Taiwanais qui m’a permis d’étudier à Taipei durant l’année 2007-2008.
J’ai ainsi passé 2 années à Taiwan : la première à Lukang en immersion totale dans des familles d’accueil et suivant la journée des cours dans le lycée de la ville; la seconde en tant qu’étudiant dans le centre de mandarin de l’Université nationale normale de Taiwan, à Taipei.
TaiwanMag : Parlons de ta première année à Lukang. Peux tu nous expliquer par quel biais es tu parti dans cette ville ?
Ma 1ère année à Lukang, juste après mon Bac, s’est inscrite dans le cadre du Programme d’Échange d’étudiants du Rotary Club. Le Rotary Club est une fédération de Clubs associant des notables locaux (docteurs, professeurs, directeurs d’entreprises, ingénieurs) ayant de fait la triple volonté de soutenir des projets caritatifs, de s’organiser de bon repas ensemble (!), et de se côtoyer pour s’ informer mutuellement afin de mener à bien leurs projets communs. L’adhésion est assez cher (environ 1000 euros/an), et l’un des projets que ces Rotary Clubs soutiennent est l’échange d’étudiants (généralement un fils de membre) d’un pays à l’autre. Aussi, le Rotary club de ma ville proposant une telle bourse à un non-rotarien, j’ai profité de l’annonce pour candidater et je fus pris.
Malgré les encouragements pour partir aux États-Unis (nous étions alors en décembre 2002 !), j’ai préféré partir vers l’Asie montante et la civilisation chinoise. J’ai ainsi atterri à Taiwan (la Chine communiste n’ayant pas de Rotary clubs), dans la petite ville de Lukang. J’avais appris une dizaine de mots (bonjours, c’est ok, etc.) et le chinois m’avait été décrit comme impossible à parler en 9 mois.
Dans cette ville, je fus confié à une famille rotarienne ne parlant « que » taiwanais, mandarin et un peu anglais (1ère claque), et inscrit dans une classe de 1ère où les élèves ne parlent généralement qu’un très mauvais anglais et discutent entre eux en taiwanais, les cours étant eux en chinois (2ème grosse claque).
TaiwanMag : Passer une année en immersion totale à Taiwan au sein d’une famille locale est pourtant un contexte on ne peut plus favorable à un apprentissage linguistique accéléré…
Dans un tel environnement, sans francophones, et avec peu d’anglophones, l’isolation fut rapidement très sévère et commença alors pour moi un véritable combat : je me tenais toujours à l’affût des quelques mots que je pouvais reconnaître, afin qu’ils me servent de cadre à la compréhension de nouveau mots. La gestuelle, l’attention et la débrouillardise sont alors les éléments principaux d’une communication universelle.
En septembre, je ne comprenais RIEN, puis quelques mots, quelques phrases. J’ai sensibilisé mon oreille aux sons chinois tandis que j’observais avec de grands yeux toute étrangeté se déroulant devant moi. Après 3 mois (fin novembre), je réussis à former mes première vraies-phrases maladroites. Je commençai alors à sortir d’un brouillard épais pour entrer dans une salle aux puzzles linguistiques. De novembre à avril, j’acquis des réflexes, je comprenais de mieux en mieux et arrivais enfin à communiquer verbalement. Mes discussions étaient bien entendues basiques, et il ne fut pas évident d’être ainsi réduit dans mes paroles à un vocabulaire d’enfant. D’avril à juillet, j’arrivai à avoir des discussions plus sérieuses et a comprendre sûrement plus de 90% des mots d’une discussion. C’est dans cette période que j’ai vraiment pu me construire un groupe social et à sortir de mon mutisme forcé.
TaiwanMag : Parlons maintenant de ta vie en famille d’accueil : l’intégration fut elle facile ?
S’agissant de la vie au sein de ma famille d’accueil plusieurs choses m’ont marqué: l’utilisation systématique des baguettes (on s’y fait vite !), le fait de devoir enlever les chaussures à l’entrée, le soucis constant de l’économie d’eau et le tri des déchets, mais aussi la distance entre les personnes (les taiwanais ne rient pas à grand éclats de rire, ont peu de geste affectueux en public).
Ma première famille d’accueil étant alors une un couple de 50 ans, leur fille unique avait déjà quitté le foyer. J’ai en tout cas été beaucoup aidé par l’intelligence de ce couple et sa volonté (forcenée !) de m’enseigner quotidiennement les bases du chinois.
Au contraire, ma seconde famille -plus aisée- m’accueillit, me plaça l’étage supérieur de leur belle maison, et chaque membre poursuivit ses discussions dans une langue mystérieuse sans se soucier de savoir si je comprenais ou pas, sans non plus tenter de me l’enseigner. Je pensais alors être redevenu nul en chinois ! Je ne reconnaissais plus rien ! Je compris ensuite que tous les discussions au moment des repas se faisaient en langue locale : le taiwanais. Comme partout, certaines personnes ont la volonté d’aider, d’autres non. 3 mois plus tard, je quittai ainsi cette famille d’accueil sans avoir progressé d’un iota : je suis venu, j’ai vu, j’ai rien compris.
Ma 3ème famille d’accueil fut « une vraie famille », avec une petite sœur raleuse de 15 ans, un petit frère malin de 12 ans, et une mère poule [veuve] qui va toujours de l’avant et gère au mieux les bouderies de l’un ou de l’autre. La présence de Yuhui (le petit frère) fut véritablement géniale : il profitait de ma présence pour faire les 400 coups, c’est à dire pouvoir partir jouer au basket avec ses potes, discuter jeux vidéos, cinéma, etc. J’ai particulièrement apprécié la spontanéité propre à sa jeunesse, spontanéité anti-confucéenne qui fait trop défaut aux peuples asiatiques. Ma mère d’accueil m’intégra rapidement à la vie familiale assez dense, puisque les grands parents, cousins et cousines vivaient tous dans le même quartier, leur vivacité a facilité mon intégration. La bonne ambiance de ce clan Lin m’a vraiment impressionné, j’ai adoré la simplicité de leurs réactions, m’intégrant naturellement à leurs activités. Je garde encore une impression très forte de cette famille que je considère désormais comme ma seconde famille.
TaiwanMag : Tu as mentionné que la journée tu suivais des cours au lycée de Lukang : peux tu nous parler du système scolaire taiwanais ? diffère-t-il beaucoup du notre ?
Le système taiwanais est beaucoup plus réglementé que le système français.
Ainsi, j’ai eu mon premier choc lors de la préparation de la rentrée des classes: j’ai du m’acheter des tenues standardisées aux couleurs de l’école. Deux tenues de sports bleu et blanc (j’ai rigolé pendant 2 jours en m’apercevant que j’allais passer un an dans une école habillé comme un Stroumph), et un costume sérieux gris. Les chaussures devant être assorties : chaussures de sport blanches obligatoires, et de cuir noir pour le costume. Pas de place pour les rastas jamaïcaines, les vêtements de marque, les boucles d’oreilles ou les lentilles de contacts colorisées, tous le monde pareil. Cheveux courts pour les garçons, cheveux longs obligatoire pour les filles. Les étudiants d’échanges filles venues comme moi à Taiwan en furent traumatisées.
Pourtant, après 3 mois, nous étions tous d’accord : l’uniforme c’est mieux ! (et je suis depuis franchement partisan de l’uniforme jusqu’au bac ). D’abord, plus de styles vestimentaires favorisant les discriminations entre lycéens, que ce soit pour des questions de styles (Gothiques opposés à classiques, etc.) soit pour des raisons sociales. Ensuite, mes compatriotes françaises [envoyées dans d'autres villes] ont apprécié la facilité du choix vestimentaire au réveil : l’uniforme. Plus de corvée maquillage non plus, celui-ci étant prohibé.
Autre point important, les uniformes scolaires portent clairement le nom, prénom, numéro de l’étudiant et classe de l’élève. L’uniforme distinctif désignant l’école, tout élève se déplace de fait avec une « pancarte identitaire » sur lui, du réveil jusqu’ au retour chez lui (souvent vers 18 heure). Aucun lycéen n’oserait simplement fumer, insulter, ou voler un chocolat : en 5 minutes son proviseur serait averti. Du coup mes camarades lycéens tawanais avaient encore des vies de gamins. Les plus rebelles osaient fumer quelques cigarette par semaines, en cachette, alors que 80% des lycéens français fument fréquemment du tabac.
S’agissant de la vie au lycée, les classes sont d’environ 40 élèves.Chaque classe dispose de sa propre salle de cours et ce sont les professeurs qui se déplacent de classe en classe. Les élèves d’une classe sont ainsi attachés à leur salle et responsables de la propreté des lieux. Chacun est respectivement responsable de sa table et de sa chaise individuelle.
TaiwanMag : Par ailleurs, comment se passe la journée d’un élève taiwanais ?
Il faut admettre une chose : les lycéens taiwanais ont de plus longues journées et sont plus débrouillards que les lycéens français.
La présence à l’école est exigée à 7:00 pour permettre 30 minutes de révisions tranquilles ou… d’interrogations écrites ! Cela permet d’avoir le reste de la journée consacré 100% aux cours. Ces interrogations sont toujours sous forme de QCM ou sous forme de questionnaires demandant des réponses courtes. Cette technique récente de QCM est aujourd’hui remise en cause, les anciennes générations critiquant le manque de rédactions longues et donc de réflexions complexes.
A 7:35, les exercices physiques et d’encouragement ! L’ensemble des 2.000 élèves en uniforme de Stroumphs migrent vers la pelouse-stade de l’école, sur laquelle chaque classe entre dans un ordre précis, avec un porte drapeau (le délégué) et une pancarte au nom de la classe en tête. La pelouse se remplit militairement, au pas de course, chaque classe se dirigeant vers son rectangle propre, en rang de 10, bien alignés. L’hymne national de la République de Chine est écouté avec plus ou moins d’attention, puis le Proviseur se lance dans un discours d’encouragement [peu écouté par les élèves]. Un professeur de sport prend le relais et, de l’estrade, donne 10 minutes de cours de gym-tonique en musique. C’est ainsi que 2.000 stroumphfs taiwanais et moi-même nous mettions à gigoter dans tous les sens. Avec bien sûr quelques élèves qui, dans chaque classe , continuaient a faire les cons en se chamaillant dès que le surveillant le plus proche tournait le dos.
À 8:00, de retour dans les classes, les cours commencent : les professeurs s’enchaînent heure après heure avec de courtes pose de 5min entre chaque cours.
A midi, la fin des cours de la matinée lance l’agitation du repas qui se déroule dans la salle de cours. Un groupe de 6 part chercher les 5 grands plats destinés à la classe : riz (blanc ou spécial), légumes, autres légumes, viande, demi-sucrerie. D’autres prennent 5 bureaux individuels et les sortent dans le couloir, les alignent contre le mur de la classe, pour accueillir les plats. 4-5 autres volontaires feront le service. Chaque élève sort son kit -pique-nique (une boîte, son couvercle, 2 baguettes, une cuillère),vient s’ajouter à la queue d’élèves en Tendant sa boite pour récolter la manne de midi avant de retourner manger à sa place. Ceux qui ont fini s’en vont laver leurs plats et baguettes tandis que les plus gourmands reviennent se servir (il y a assez pour 50 personnes). Vu les trucs délicieux qu’il y avait, j’en faisais toujours parti. la réalité était toutefois bien chaotique, ça partait un peu dans tous les sens, y avait du riz qui tombait partout, beaucoup mangeaient debout, à la fenêtre, en marchant ou même au bureau du professeur pour faire le chef. Surprenant: dès 12:30, la plupart ont fini, les plats sont ramenés en bas, les tables du couloir rentrées.
A 12:30, surprise: la sieste ! Tout le monde doit faire silence et dormir sur son bureau pour digérer. Les surveillant généraux rodent dans les couloirs pour surveiller le respect de cette période de repos: il y a toujours une partie qui ne veut pas dormir et qui continue à discuter ou à circuler partout… en gardant un oeil sur le surveillant. À 13:30, la classe renaît pour une demi heure de révisions.
De 14:00 à 17:00 les cours reprennent. Avec une pose notable de 15 minutes à 16 heures. C’est le la pose nettoyage. Quelque chose d’impensable en France ! Les élèves sortent des placards de la classe 5-6 balais !! autant de serpillières ! des éponges et chiffons, et se lancent à l’assaut de leur classe : le sol est balayé (classe + couloir !), la serpillière passée, les tables essuyées, le tableau nettoyé, les poubelles vidées, le stock de craies vérifié. D’autres partent carrément… nettoyer les toilettes ! (Incroyable !) C’est fait rapidement et sans aimer, mais cela doit être fait, c’est donc fait franchement. Résultat : les WC du lycée étaient TOUJOURS impeccables et personne n’aurait osé dégrader ce travail commun.
La dernière heure de cours achève la journée scolaire.
TaiwanMag : Passer 10 heures entouré de jeunes locaux a dû favoriser les échanges et les interactions en tout genre, non ?
Les débuts à l’école furent délicats : je ne comprenais RIEN, et devais communiquer par gestes et regards. Mes camarades de Lukang furent d’abord fascinés et très curieux par ce « nouveau français », je débarquais pour eux de ce lointain monde occidental que l’on ne voit qu’a la télé, et je représentais plus l’Amérique que l’Europe. Mes camarades garçons surent rapidement employer un anglais très basique et haché pour me demander si les filles françaises se promenaient toujours nues sur les plages, si elles étaient blondes ou brunes, etc.
Ces camarades me guidèrent dans les premières semaines pour m’adapter au rythme de leur classe. Je ne comprenais rien et devais les suivre bêtement. A force, la situation devint délicate. La communication étant difficile, la frustration surgit alors des deux cotés. Aussi, je passai rapidement du stade de « centre d’intérêt de la classe » au statut « d’élément transparent ».
C’est un fait : tenter de communiquer avec moi était trop laborieux. Déconner avec les potes est bien plus sympathique. Aussi, c’est la encore un petit désert sans mots qu’il m’a fallu traverser. Je notais sur un petit papier les détails croustillants et spéciaux qui se déroulaient sous mes yeux : leur vie à l’école, leur rapport les uns aux autres, leurs intonations de voix, les sonorités chinoises et taiwanaises, les yeux chinois tantôt sérieux tantôt en banane joyeuse La France est gueularde, franche, directe et donc parfois agressive. Mes camarades étaient plutôt discrets, timides, gamins.
Leurs relations amoureuses m’ont, relativement à ma culture française, paru également « gamines ». J’ai vu deux camarades se tourner autour sans se regarder durant une semaine, marcher côte à côte en s’entre aidant la semaine suivante : on m’a expliqué qu’ils étaient ensemble ! La 3ème semaine il lui a posé la main sur l’épaule (je jure sur m’a vie que ce fut le seul contact corporel en 3 semaines !)… 5 secondes ! (je le jure sur ma vie aussi !) Ce n’est que la 4ème semaine (!) que, parfois, ils se sont tenu la main discrètement… quelques secondes. Je ne suis pas naïf au point de penser que mes camarades de 17 ans s’en tiennent là et ne s’embrassent jamais. Mais cela marginalise largement les embrassades tonitruantes des lycéens français du même âge. A Taiwan, la discrétion dans les relations amoureuses est de rigueur, les signes visibles sont rare, et il a vraiment fallu que je sois dans leur classe, 8 heures par jours, pour avoir un doute puis une confirmation (puisqu’il lui a pris la main). Cette mignonne petite discrétion est à double tranchant. Vers avril, je découvris ainsi qu’un autre de mes camarades avait 2 petites amies… dans la même école ! Vu le peu de signes extérieurs d’affection exprimés en public, chacune, chouchoutée dans la sphère privée, prenait les autres filles comme de simple connaissances de leur même petit ami. La discrétion confucéenne permet aussi de jouer avec les apparences.
TaiwanMag : Parlons justement des modes d’interactions à Taiwan : tu nous as décrit les jeunes asiatiques comme « discrets » voire « timides ». Il ressort de ton expérience que ces jeune sont très gentils, n’y a-t-il donc jamais de conflits ?
A Taiwan, les rapports interpersonnels sont différents des nôtres : « garder la face » et « fuir le conflit« étant les principales innovations. L’Europe a également des notions assez identiques : »se montrer constamment respectable », « arrondir les angles », mais à un degré moindre.
La notion de face, le fait de garder la face, si elle signifie qu’il faut constamment apparaître respectable, n’en reste pas moins une façade. Mes « polis » camarades taiwanais critiquaient, se moquaient gratuitement, étaient parfois manifestement égoïstes, et faisaient aussi des blagues méchantes, ceci en quantité proche de celle des lycéens français si adeptes de l’attaque personnelle directe et gratuite. Mais, à Taiwan, ces attaques se font discrètement, dans le dos des concernés. La personnalité asiatique à tendance à arrondir les angles, à sourire en face : on évite les conflits, donc on n’exprime pas directement ses sentiments. Lors d’argumentations, il n’y pas [peu] de « NON ». On contourne et ignore les oppositions pour amener les gens à adhérer à notre propos. On fuit toute sorte d’oppositions directes, mais on reste critique. De l’autre coté, mes camarades taiwanais (et les asiatiques en général) sont aussi très aptes à encourager. Ils encouragent et s’émerveillent facilement. Ce n’est pas toujours très sincère, mais cela montre une volonté d’avancer, soulignant les points forts, oubliant les points faibles.
À l’opposé, le naturel français a plutôt le réflexe de montrer les erreurs du doigt, d’exacerber les angles, de bien et franchement faire connaître son sentiment et même son ressentiment, comme par un souci forcené de « liberté d’expression à tout va », et une volonté fréquente de s’imposer de manière absolue. A Taiwan, j’ai découvert une peur du conflit qui se transforme en hypocrisie de fait. Mais cette hypocrisie a aussi comme point positif qu’elle fonctionne: les individus qui ne peuvent pas se sentir continuent à se sourire et a travailler calmement. (En France, ce serait une guerre de tranchée !).
Perdre la face, c’est être dévoilé dans son jeu mesquin, dans son incompétence. Quitter ce jeu de politesse pour faire perdre subitement la face à quelqu’un c’est une mini déclaration de guerre qui peut se régler à coups de poing. Pas forcément préférable … Mais c’est parfois cela qui pose problème dans les groupes et entreprises asiatiques, personne n’ose parler des points faibles. Les occidentaux, habitués à s’attaquer franchement aux problèmes mais en immersion totale dans de tels groupes ou entreprises ont souvent, à leurs débuts,de grosses difficultés d’adaptation. Leur franchise perçue comme banale en occident, est ici vue comme une véritable agression, car la manière n’y est pas.
C’est ainsi qu’un camarade ne pouvant pas me sentir venait tous les jours me saluer avec le sourire tout en se foutant de moi en chinois [il ne savait pas que je comprenais], et enchaînait en demandant qu’on prenne des photos ensemble. Sorte de douche écossaise culturelle pour un occidental débarquant là bas.
Comme partout, les individus d’un même groupe sont plus où moins forts et bienveillants. Certains profitaient de ma compréhension limitée du chinois pour s’offrir du fun, d’autres m’aidaient et me protégeaient remballant les 1ers.
TaiwanMag : Et la découverte du pays dans tout ça ?
L’année scolaire finissant – et mon séjour sur l’île également- j’ai voulu organiser la venue de mon petit frère (18ans alors) et un Tour de Taiwan, dont une large partie s’est effectuée à vélo ( vélo trip en franglish).
Lorsqu’il est arrivé, nous avons visité Taipei (la tour 101 était encore en construction). Puis, nous sommes partis à Lukang, retournant dans ma famille d’accueil. Un professeur de l’école nous à invité à passer une semaine à Nantou, où nous avons dévoré des kilos de mangues fraîches. Cette famille (la mère et les 2 filles de 4 et 6 ans) qui retournait dans la vieille maison familiale de Nantou (centre) nous a montré la vie joyeuse d’une famille modeste. Au deuxième étage, les pièces étaient petites, la mère dormait sur des tatamis avec les deux fillettes, une cloison coulissante japonaise séparant du couloir. Mon frère et moi dormions dans une seconde chambre avec du linge étendu partout à la fenêtre, vie d’appartement oblige. L’agitation matinale de la ruelle nous réveillait, puisqu’il faisait trop chaud pour garder les fenêtres fermées la nuit. Les 2 fillettes de 4 et 6 ans se mettaient rapidement a courir partout en parlant chinois : la journée était lancée ! Jusque là protégé dans le confort des familles d’accueil aisées du Rotary Club, ce n’est qu’ici que j’ai pu découvrir la réalité de la vie quotidienne du plus grand nombre des taiwanais.
Le vélo trip commence là. Mon frère et moi-même sommes partis en train et avec un vélo vers le nord, dans le but de parcourir toute la côte pacifique. Cela représente 350km de route. Arrivés à Rueifang un dimanche, les 3 magasins de vélos de la villes étant fermés [y penser : les taiwanais on aussi des jours de repos !] nous avons dû faire 15 km à rebours, à deux sur un vélo, chargés d’un sac et d’une tente en direction de Keelung . La carte ne le montrait pas, mais nous avons découvert ainsi l’aspect montagnard de Taiwan. Un jeune taiwanais à l’allure de rebelle nous a guidés [toujours 2 grands dadais sur leur fragile vélo !] jusqu’à un magasin de vélos OUVERT un dimanche… il y en a !
Le vélo trip, à 2 vélos, commence vraiment ici. Nous partons vers l’Est, sur le bord de la nationale longeant la côte. La fin d’un typhon mourant nous fait parfois pédaler face à un puissant vent de 70 km/h, ces bourrasques nous ont fait faire du surplace ! Nous longeons la très belle côte pacifique. Pour s’héberger et se doucher, nous débarquons à l’ internat d’un lycée, le surveillant général nous laisse alors la chambre d’un élève n’étant plus là (c’est les vacances), la douche étant en libre accès : génial ! La nuit suivante se passe sous la tente, en bord de pacifique, tandis que nous achetons 5 minutes d’eau d’arrosage à une vieille hôtelière dure en affaires. Le 3ème jour, (nous avons dû parcourir 100 km de zigzag!) nous comprenons que le vent de face sera une constante : l’été, le vent dominant va du Sud-Est vers le Nord-Ouest, l’opposé de notre direction. Ce n’était pas marqué sur la carte. Arrivés à Yilan, nous rencontrons le surveillant général d’un lycée qui nous propose carrément son appartement de fonction !
Partant vers Hualian, nous attaquons la montagne à 17 heures, il commence à faire nuit : au prochain village, on s’arrête. 22 heures 30 : nous continuons à monter en zigzag, la pente est telle que nous devons faire du 3-4 km heure : nous irions aussi vite à pied. Le relief de Taiwan n’était pas sur ma carte, je sais aujourd’hui que nous nous somme lancés à l’assaut de l’une des plus haute et dangereuses route de Taiwan. A droite, la montagne ; à gauche, la route et des poids lourds qui nous passent à coté. Plus à gauche : 400m de falaise abrupte qui mènent droit à l’Océan pacifique. Une camionnette bleue s’arrête et nous propose de nous prendre en stop : nous sommes sauvés ! Ils nous dépose près de Hualian, nous épargnant une route de montagne magnifique mais humainement impossible à faire à vélo.Nous continuons ainsi à vélo, achetant des fruits aux vendeurs de bord de route, ou des plats à emporter dans les rue de petites villes côtière. Les petits temples asiatiques ayant en principes 3 murs absents, cela offre un toit parfait pour passer les nuits. Ces temples disposent généralement d’électricité pour l’éclairage de l’autel, et d’eau pour faciliter l’entretien. Une multiprises nous permet de recharger nos portables, et l’eau de nous doucher. Nous arrivons ainsi lentement vers Taidong , dans un petit village entre océan et montagne :un professeur nous propose de passer la nuit dans un appartement de fonction non occupé. Certains membres du villages étaient très mâtes, beaucoup plus que le commun des taiwanais, d’autres semblaient métisses, et d’autres encore avait une peau de pékinois ou japonais. L’on pouvait lire sur la couleur de peau des individus du village l’histoire de Taiwan, la colonisation d’une île d’aborigènes austronésiens mâtes, par de récentes vagues de populations chinoises (Han).

Nous repartons ensuite de Taidong en train, et passons rapidement saluer les personnes qui m’ont accueilli et aidé durant l’année avant de repartir, quelques jours plus tard vers Taipei et Paris. Le retour en France fut, comme prévue, difficile. Je ne savais alors pas que je pourrais 3 ans plus tard avoir le plaisir d’y retourner :]
Merci à toi Yuguo d’avoir partagé cette formidable aventure humaine avec nous !
Toute l’équipe de TaiwanMag te souhaite bonne chance pour la suite !
Photo et carte de Taiwan : collection privée de Luo YuGuo

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