Ni taoïste, ni bouddhiste, ni même confucéen, le temple Hsingtien Gong est un endroit vraiment à part dans les lieux de culte de la capitale Taipei. Construit durant la période d’après-guerre pour répondre aux besoins d’une large communauté d’immigrés chinois qui ont débarqué en urgence depuis le continent pour fuir le gouvernement communiste, Hsingtien Gong de Taipei fait en réalité partie d’un ensemble de plusieurs temples dont le principal se situe dans l’arrondissement de Beitou. Ayant choisi le général Kuan Yu comme divinité principale du temple, Hsingtien Gong prône davantage les valeurs morales et l’accomplissement de soi plutôt que des formes de croyances que l’on trouve généralement dans les temples taoïstes ou bouddhistes.
Et cela tient principalement au fait que venant de plusieurs régions de la Chine, cette grande communauté d’immigrés chinois arrivée dès 1949 n’était pas du tout familière avec les croyances populaires présentes depuis des siècles à Taiwan. Hsingtien Gong se veut plus dépouillé que la majeure partie des autres temples, tant sur le plan architectural qui le rapproche davantage des temples confucéens (du moins de l’extérieur) que sur le plan des croyances et pratiques religieuses.
Ainsi, nul besoin d’appartenir à tel ou tel groupe, n’importe quel croyant d’une autre religion est le bienvenu et peut se recueillir devant ce collégial de 5 divinités, dont Kuan Yu, qui sont toutes liées à la littérature, l’éducation.
En ce sens, le temple Hsingtien Gong a toujours développé une approche différente, un peu à part, de la pratique religieuse. Tout du moins, bien loin de celles des temples taoïstes ou de croyances populaires.
C’est donc sans grande surprise que le temple Hsingtien Gong a choisi de mettre un terme aux pratiques d’offrandes et à l’usage de l’encens dans son enceinte. La pratique était jusqu’à présent assez minime, mais pour des raisons principalement d’ordre environnementale et pour lutter contre le gaspillage, ces dernières ont été purement et simplement abandonnées au profit du recueillement et d’une simple prière sincère.
Récemment, Meg Wang a développé cette thématique dans un gros plan sur l’actualité et je vous propose d’en retrouver ici quelques passages qui préciseront ce choix du temple Hsingtien Gong :
A propos de l’écologie, le but principal est de lutter contre la pollution de l’air. Selon une recherche conduite par Lung Shi-jun de l’Académia Sinica, le temple est la principale source de pollution de l’air dans les quartiers résidentiels. Les bâtonnets d’encens brûlés produisent des particules en suspension dont la concentration peut s’élever jusqu’à 43 microgrammes par m3. C’est quasiment le double du niveau fixé par l’OMS, soit 25 microgrammes par m3 et par jour. D’ailleurs l’encens émet des substances puissantes comme le benzène, le méthylbenzène ou le xylène qui sont des sources de toxines qui attaque le système nerveux ou qui provoquent des cancers comme la leucémie. Sur une période longue, les bâtonnets d’encens qui contiennent ces substances chimiques sont une source directe de maladie, notamment du cancer des voies respiratoires. Yen Zong-hai, médecin en toxicologie de l’Université Chang Geng fait part de ses préoccupations : « Lorsqu’une personne brûle des bâtonnets d’encens, elle est soumise à une pollution de l’air importante. Ce qui nous préoccupe particulièrement, c’est l’augmentation des particules fines en suspension PM2,5. Des particules fines pénètrent les alvéoles pulmonaires et y restent provoquant des réactions allergiques. Sur le long terme, elles accroissent les risques de cancer du poumon et de maladies cardiovasculaires. »Il est vrai que de nos jours, les arbres dont sont issus les encens entièrement naturels sont extrêmement rares, ce qui augmente considérablement les prix des bâtonnets d’encens naturels. Ainsi, lorsqu’on sait que les bâtonnets d’encens sont vendus pour une somme très modique, voire même offerts aux croyants par les temples qui lui utilisent, il devient impensable que cet encens soit conçu à partir de produits entièrement naturels. Li Chu-hua, un responsable du temple a indiqué que dès sa fondation, le temple Hsingtien Gong n’avait déjà pas prévu de four pour brûler le papier monnaie célèste. Il y a 11 ans, le temple a retiré 3 de ses 5 grands encensoirs et a arrêté la vente de bâtonnets d’encens et d’offrandes. En contrepartie, le temple offre à chaque croyants deux bâtonnets d’encens. Cependant, compte tenu de la fréquentation importante, soit environ 6 millions de visiteurs par an, deux bâtonnets d’encens par personne dégradent tout de même la qualité de l’air.
En comparaison avec la plupart des autres temples, 2 bâtonnets d’encens représentent une quantité plutôt faible. Dans les temples taoïstes ou de croyances populaires, ce nombre varie davantage entre 6 et 12 bâtonnets et peut-être même parfois plus. Le recours à l’encens et le nombre de bâtonnets utilisés est une affaire propre à chaque temple et il n’y a guère de règle fixée en la matière. En arrêtant totalement le recours à l’encens, du moins pour ce qui est des visiteurs puisque les exorcistes continueront de l’utiliser, le temple Hsingtien Gong fait un choix assez avant-gardiste et se rapproche de certaines écoles bouddhistes comme Fagushan, qui ont cesser d’utiliser l’encens il y a quelques années déjà.
En ce qui concerne la politique de lutte contre le gaspillage et le choix de mettre fin à la pratique des offrandes, voici un autre passage du gros plan sur l’actualité de Meg Wang :
Le responsable Li Chu-hua a indiqué que compte tenu de l’importance des croyants, le temple produit un énorme gaspillage. Les croyants qui viennent prier avec des offrandes ont l’habitude de les laisser sur les tables. Par le passé, les gâteaux de riz qui se vendent dans les alentours du temple à dix dollars taiwanais étaient rassemblés par le temple puis offerts aux structures dans le besoin. Cependant, compte tenu des ajouts de conservateurs dans ces gâteaux, le temple a arrêté de faire don de ces offrandes. Ce qui fait que chaque jour, le temple met à la poubelle des centaines de gâteaux de riz. Lorsqu’il s’agit de grands jours d’offrandes comme le 1er et le 15ème du mois lunaire, le temple jette par millier ces gâteaux. Quant aux autres snacks qui étaient offerts par le passé aux différents orphelinats, c’est un peu le même principe dans le sens où la notion de santé est de plus en plus présente. Les orphelinats refusent aussi ce type de produits. De là, les offrandes deviennent directement des ordures. C’est donc dans le but d’éviter le gaspillage que le temple Hsingtien Gong a retiré les tables à offrandes.
Une décision qui porte cependant un coup très dur aux quelques commerces aux alentours qui dépendaient de la vente de ces produits pour les offrandes. Egalement touchées, les nombreuses vendeuses à la sauvette qui virevoltaient devant le temple, autour du carrefour des avenues Minquan East Rd/Songjiang Rd…
Faire ce choix sur des bases écologiques est particulièrement louable et cela n’a pas véritablement perturbé la fréquentation des fidèles qui est toujours importante à toute heure de la journée. Néanmoins, cette évolution reste controversée. L’usage de l’encens étant particulièrement ancrée dans la culture des temples taoïstes ou de croyances populaires, il est fort probable que ces derniers ne marcheront pas dans les pas de Hsingtien Gong. Du moins, pas dans l’immédiat. Le recours à l’encens est une pratique ancestrale et qui est notée dans le Classique des Rites. Brûler de l’encens fait partie du processus de prière et selon les taoïstes, c’est l’esprit même de Laozi qui est symbolisé par la fumée de l’encens. Il serait tout simplement impensable de faire sans l’encens.
En ce qui concerne la critique quant à la décision du temple Hsingtien Gong, si beaucoup comprennent la raison écologique, ils estiment que la recherche de cet idéal ne doit pas se faire au détriment complet de cet culture ancestrale. Si beaucoup de temples abusent de l’encens, alors plutôt que de l’interdire complètement, il serait peut-être plus approprié de repenser son usage. On peut ainsi prendre l’exemple du temple de Lungshan qui, en terme d’usage d’encens, se présente à Taipei comme l’exact opposé du temple Hsingtien Gong. Le temple Lungshan ne met plus gratuitement de l’encens à disposition des visiteurs. En revanche, il vend des bâtonnets d’encens approuvés par le bureau gouvernemental de l’environnement aux fidèles qui souhaitent en utiliser.
En ce qui concerne la critique quant à la décision du temple Hsingtien Gong, si beaucoup comprennent la raison écologique, ils estiment que la recherche de cet idéal ne doit pas se faire au détriment complet de cet culture ancestrale. Si beaucoup de temples abusent de l’encens, alors plutôt que de l’interdire complètement, il serait peut-être plus approprié de repenser son usage. On peut ainsi prendre l’exemple du temple de Lungshan qui, en terme d’usage d’encens, se présente à Taipei comme l’exact opposé du temple Hsingtien Gong. Le temple Lungshan ne met plus gratuitement de l’encens à disposition des visiteurs. En revanche, il vend des bâtonnets d’encens approuvés par le bureau gouvernemental de l’environnement aux fidèles qui souhaitent en utiliser.
En conclusion, rappelons tout simplement l’introduction de cet article, à savoir que le temple Hsingtien Gong propose un culte qui est différent de ceux des temples taoïstes, de croyances populaires ou bien même bouddhistes. Cette décision ne concerne finalement que les 3 temples qui constituent cet ensemble dédié à la croyance et valeurs mises en avant par le maître Hsuan Kung qui est à l’origine de la fondation de ce temple.
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